L'écriture en mouvement, chaque humain est un poème
nelson mederik
Je commande Une vie, par Isadora Duncan, son autobiographie. Bien sûr, elle ne peut l’écrire dans son entièreté, car sa vie se termine de manière tragique. Sa vie d’artiste, d’intellectuelle, d’érudite, d’amoureuse et de mère ; de sœur, aussi, et de libre féministe, a été par moments d’un tragique dont elle avait l’intuition. Isadora Duncan, une grande sorcière de la Grèce antique (née à San Francisco en 1877, Isadora Duncan décède en 1927).
Isadora Duncan, mère de la danse moderne pour certains, et peut-être usurpatrice du titre quand on visionne le biopic sur Loïe Fuller.
Inspirée par l’histoire artistique et culturelle de la Grèce antique et, depuis fillette, par le mouvement des vagues qu’elle tentait de reproduire avec son propre corps d’os, de sang, de chair et d’images, Isadora dansait.
Le mouvement.
Quelque chose d’imprécis se déroule à partir du moment où j’entends pour la première fois le nom d’Isadora Duncan. D’imprécis et, en même temps, de tout à fait juste pour moi.
Le mouvement.
Je commence à regarder le monde – et ce monde c’est celui de Percé – avec cette idée du mouvement.
Chaque vague est une vague nouvelle.
Chaque nuage est un nuage nouveau.
Chaque seconde de ce ciel, qui sans fin se recompose un tableau, ne reviendra deux fois.
Chaque pierre, chaque arbre est un nouveau mot pour le nouveau vocabulaire.
Chaque humain est un poème.
Chaque montagne, un lieu où se dépasser.
Et tout bouge, rien ne se reproduit deux fois ; pas même le café du matin, pas même le cœur qui bat pour un regard.
Le temps s’étire et il le fait dans une grande danse, prenant chaque avenue simultanément.
Je retourne chez moi et la musique dans les oreilles, je vois la cuisine se transformer en lieu hors du monde. Je danse. Et mon personnage danse à travers moi et le temps, le paysage et Percé. Et tout danse ensemble.
Parfois, sur la pelouse, les pieds nus, je me laisse glisser et, comme les étoiles pétillant dans mes yeux et l’humidité sur la pelouse, je me transforme. Je suis la danse et je danse.
Le mouvement.
Pour écrire, ou plutôt pour parvenir à une forme d’écriture en accord avec ce qui se joue à l’intérieur de moi, il m’a fallu bien des années et bien des mots étendus, collés et grafignés sur le papier.
Depuis quelques temps, je remarque que du mouvement, celui de mon corps dans l’espace et du monde dont je témoigne, naît un souffle qui concorde avec ce qui tente de s’exprimer.
J’entre dans le métro, le métro se met en mouvement. Je suis avec une cohorte d’inconnus qui entrent et sortent des wagons aux différentes intersections. Tout est mouvement. Et la poésie monte, ou descend-t-elle de je-ne-sais-où. Les mots me traversent et les images veulent s’inscrire, et je les écrit sur les notes de mon téléphone cellulaire ou dans un carnet. Écrire presque aussi rapidement que déroulent mes idées de ma pensée.
Je me souviens, enfant, c’était un désir très présent que j’avais de pouvoir écrire mes pensées, ces histoires qui naissaient, ces faits auxquels j’étais présente, aussi vite qu’elles me traversaient.
Il y a aussi l’autobus voyageur, et de voir le paysage défiler et m’offrir des images.
Et la marche, et les rencontres.
C’EST DANS LE MOUVEMENT QUE S’ÉCRIT UNE GRANDE PART DE MON MONDE INTÉRIEUR.
Le mouvement.
Je me rends donc compte que mon écriture, de plus en plus, s’accorde à ma personne.
Si enfant, mon premier désir était de danser, aujourd’hui, même si je le fait très peu, c’est par le mouvement qui jaillit de mon monde intérieur et par les mots, que les pas et les chorégraphies prennent vie.
Mes poèmes s’écrivent en vivant. Mon roman s’écrit désormais dans le vif du mouvement qu’est vie (il est vivant, plus que jamais et habite ma maison avec vagues et grands vents).
La vie continue d’être plus riche, parce que mon regard sur le monde, en plus de s’être éclairé, s’est élargi dans tous les sens.
Je souhaite donc te partager régulièrement, ici même sur le blog, des poèmes écrits dans le mouvement où tu pourras reconnaître certains lieux, mais surtout, je veux que tu te les appropries. Je te les offre, comme on offre des petits fruits récoltés dans le champ ou encore comme on offre un grand bouquet de feuilles tombées des arbres à cause des grands vents de l’automne. Ne cherche pas à me lire en me lisant, mais pars plutôt à ta rencontre.