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Le mouvement de l’immobile

nelson mederik

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Le mouvement de l’immobile 

 

d’une voix tendre 

 

épuisée 

 

j’appelle le poète 

 

mes secousses restent provisoires 

 

 

j’ai la haine des manèges 

 

je cherche le sens 

 

aux arbres nus 

 

les règles dans la tête 

 

un flux inconstant 

 

de rivières matérielles 

 

l’atmosphère te rend impudique 

 

dans tes allures de feu 

 

pourtant toutes les feuilles 

 

tombées par-terre 

 

forment un nouveau lit d’ecchymoses 

 

dans les deux cas

 

il n’y a plus aucune trace 

 

 

*

 

 

je t’écris :

 

d’abord, 

 

c’est de l’histoire entière 

 

qu’il s’agit quand je te regarde 

 

rien qu’un bout 

 

de tes ongles sert à agrandir 

 

l’espace 

 

qui trop souvent se tient 

 

dans des linges minuscules 

 

posés là 

 

sur mes paumes inquiètes 

 

je ne parlerai pas de toi 

 

comme du seul champ 

 

possible 

 

mais le monde en est un autre 

 

depuis tes airs 

 

regarde regarde 

 

là-bas 

 

je sens l’âme de Don Quichotte 

 

de la manche 

 

c’est sous les moulins à vent 

 

qu’il s’est cherché 

 

une musique 

 

aussi grande 

 

que ses envies d’exister 

 

là-bas 

 

les pales des éoliennes 

 

transforment le paysage 

 

voici d’immenses fleurs blanches 

 

elles tournent et tournent dans le vent 

 

ici,

 

le territoire semble silencieux 

 

ici,

 

s’il a plu 

 

c’était il y a plus de mille ans 

 

plus de 10 ans 

 

c’est encore une neige fondue 

 

un glacier 

 

c’est un morceau de lune 

 

c’est ce jaune que nous renvoie 

 

le soleil 

 

sur les peaux basanées 

 

du voyage 

 

ici, les gens mangent 

 

dans leurs cabines éphémères 

 

ici, le huis-clos est mouvant 

 

la trame sonore change 

 

les secousses viennent de loin 

 

j’attrape le poète 

 

cherche le rythme 

 

j’invite des gens à venir voir avec moi 

 

la nudité des arbres 

 

le tapis dense des sous-bois 

 

l’envolée des oies 

 

la longue traversée de la pointe 

 

 

*

 

 

le bon son 

 

la fréquence parfaite 

 

la définition de la structure d’une forêt naturelle 

 

je respire 

 

les morceaux de poivrons rouges qu’a délicatement découpés 

 

une femme

 

la trempette légèrement fromagée

 

les pelures d’une clémentine 

 

le gel antibactérien 

 

au parfum de lys 

 

j’entre 

 

un village se tient debout 

 

dans les maisons en éveil 

 

as-tu déjà goûté le fromage salé de la Fromagerie des Basques 

 

la vie est injuste quand on ne s’y aventure pas 

 

le fleuve s’agrandit 

 

l’île verte s’étend 

 

les souvenirs s’infiltrent dans le décor 

 

tout est sans cesse à reprendre 

 

entre les doigts 

 

comme si tout 

 

coulait 

 

entre les doigts 

 

des rubans 

 

très doux 

 

d’autres coupants

 

je prends le pari 

 

de ne revenir qu’au moment 

 

où toute l’eau de la mer 

 

aura traversé mon corps 

 

je serai alors une église de village 

 

sans être moisissure 

 

seulement 

 

pour voir plus loin 

 

faire résonner mes cloches 

 

le dimanche matin 

 

et tous les autres jours 

 

et jouer de l’écho 

 

mes drames romantiques 

 

 

*

 

 

sur le fleuve 

 

calme calme et gris 

 

les bateaux sont déposés 

 

par des bras trop grands 

 

pareils à des îles 

 

qui vont et viennent 

 

entre les lignes définies

 

la route de l’eau

 

d’où viennent nos chemises 

 

nos lunettes 

 

nos assiettes 

 

nos imperméables 

 

regarde regarde 

 

un homme a enroulé les foins

 

les vaches auront de quoi mastiquer toute la saison froide 

 

ici, on a fait un trou dans la montagne 

 

même ici 

 

même ici  

 

les objets de métal que nous animons 

 

nos bras de robots 

 

capable de pendre les arbres par les racines 

 

je marque le paysage 

 

je n’ai pas la bonne musique 

 

qu’écoutes-tu à la surface de la pluie 

 

qu’écoutes-tu 

 

dans tes chairs de douleurs 

 

j’ai pris dans mes yeux 

 

un bouquet 

 

d’arbustes 

 

pour en faire 

 

des pulls et des pantalons 

 

une érablière dans les cheveux 

 

beaucoup de bagels 

 

et une compétition 

 

de laquelle personne ne sort gagnant

 

ces batailles où l’on grandit 

 

ici, les rocheuses entourent le paysage 

 

je cherche des mots neufs 

 

pour parler des hommes et des femmes 

 

qui planent sous des draps blancs 

 

je cherche des images pour nommer 

 

le silence que laisse l’autre 

 

quand il n’est pas présent 

 

quelle saveur a l’herbe que je rumine

 

quel paysage est le plus beau 

 

préfères-tu l’effet sauvage 

 

aux plantations calculées

 

aimerais-tu sortir danser sous la pluie? 

 

même froide 

 

même si elle avance les heures 

 

où les recule 

 

sur ta montre 

 

je prends une pause 

 

le centre de contrôle 

 

cherche cherche 

 

la dislocation des verbes amoureux

 

une autre ligne pour nommer l’imprononçable sensation de celle qui reste 

 

de celui qui reste 

 

 

*

 

 

je n’ai plus sommeil 

 

c’est une histoire ancienne

 

 

*

 

 

mais d’abord 

 

je vais te parler de mon rêve 

 

comme Lucile Ryckebush 

 

dans l’incipit de son roman 

 

Le sang des pierres :

 

D’abord, je vais te parler de mon rêve, c’est avec lui que tout commence. 

 

parce qu’il m’obsède 

 

pareil à une note de musique très précise 

 

je te demanderai de faire pareil

 

pour que nos rêves tiennent ensemble 

 

dans ce bungalow blanc 

 

abandonné

 

au centre d’un champ d’agriculture

 

Jean-Michel Blais croise ses mains 

 

au piano dans le creux de mes oreilles 

 

et l’autobus descend et monte des pentes 

 

nous approchons de chez mon amie Andréanne

 

Le Bic

 

ses maisons tiennent sur pilotis 

 

se tiennent en affront à l’île aux amours 

 

c’est chez elle que l’automne se met le plus beau 

 

dans le rêve 

 

je suis une femelle oiseau 

 

dans ma peau de madame 

 

je rêve nue 

 

pourquoi porter des tissus 

 

et perdre toute la légèreté 

 

de l’innocence 

 

puisque anyway chacun et chacune 

 

tiennent dans leurs mains 

 

leur obsédante naïveté gazeuse 

 

c’est une fête 

 

je n’y prends part 

 

que par les yeux le cœur 

 

je me faufile 

 

une très grande et très grasse souris

 

j’aime tenir ma peau entre mes mains 

 

comme si cette douceur pouvait aussi m’appartenir

 

au revoir Le bic 

 

au revoir 

 

au revoir mon amie ton amoureux et l’île aux amours 

 

au revoir 

 

et le théâtre au revoir au revoir 

 

dans le rêve

 

outre les pelures roses de ma peau je transporte un pot rempli de terre 

 

dans lequel tiennent des plantes 

 

la terre est sèche 

 

les plantes meurent doucement 

 

je cherche la liqueur inodore 

 

qui saura nous ramener toutes à la vie 

 

il n’y a pas que la chaleur de tes épaules sous mes lèvres 

 

pour me donner à boire 

 

comme sous une chute africaine 

 

même si 

 

l’espoir me fait continuellement boire 

 

aux souvenirs 

 

trop souvent éthérés 

 

de nos heures passées ensemble 

 

 

*

 

 

le sais-tu 

 

que je pourrais 

 

sans peine 

 

fixer la feuille d’un arbre 

 

sans m’ennuyer 

 

pour tes yeux 

 

tout reste incomparable 

 

je ne l’explique pas 

 

j’offre l’inquiétante incertitude 

 

aux dimensions abstraites 

 

du cœur 

 

 

*

 

Allô Rimouski 

 

allô

 

d’en haut 

 

tu ressembles à une époque ancienne 

 

d’en haut 

 

je te reconnais très bien 

 

d’en haut, rien n’est plus beau 

 

que ce dessin : la ville, l’île et l’autre côté du fleuve 

 

les terres parallèles 

 

une trilogie 

 

 

*

 

 

et la seule phrase qui me vient : 

 

que penserait mon premier amour 

 

ma première violence 

 

s’il me voyait 

 

combien d’année depuis le dernier contact? 

 

 

*

 

 

arrêt jusqu’à 15h-15 

 

me rappeler 

 

qu’un double meurtre d’enfants n’est pas un drame familial 

 

me le rappeler jusqu’à tenter de le cracher correctement 

 

de trouver la ligne conductrice 

 

pour tisser l’idée qui part du corps 

 

qui parle du monde 

 

chercher l’impact 

 

d’abord 

 

dans ma réflexion au monde 

 

puis dans l’entrelacs des mains 

 

à une table 

 

se font face un homme et une femme 

 

au milieu de la table 

 

sa main droite et sa main gauche 

 

au milieu de la table 

 

se tient l’image d’un lien

 

 

*

 

 

mes seins brûlent 

 

et pendant ce temps 

 

pendant que j’attends mon végé burger 

 

je me demande 

 

si ce n’est pas 

 

par les hommes 

 

que j’apprends mon corps 

 

plus que par mes sœurs 

 

je me demande 

 

qui étaient ces femmes que l’on appelle grand-mères 

 

en dehors de leur rôle 

 

d’épouse et de mère 

 

 

*

 

 

regarde 

 

comment l’eau 

 

se faufile 

 

dans ma gorge 

 

comme ce qui naît entre toi et moi 

 

si j’étais ce que je prétends être 

 

tu aurais déjà reçu 

 

pour le creux de tes songes 

 

ces particules 

 

qui font l’air moins viciée

 

l’air à lui seul 

 

me fait émettre des fréquences 

 

d’enfant 

 

tour à tour 

 

se transforme

 

le paysage 

 

en douce chanson 

 

les paroles à demi éventées 

 

le silence ne plane jamais vraiment entre les canards et les goélands 

 

 

*

 

 

elle a deux ans et demi 

 

elle s’appelle Emma 

 

elle voyage avec sa grand-mère maternelle 

 

elle a des cheveux blonds 

 

nous regardions ensemble 

 

les oiseaux voler 

 

aux dessus des îles 

 

nous quittions simultanément 

 

une ville pour la pointe 

 

nous étions toutes deux 

 

des enfants 

 

avec un monde à interpréter 

 

elle chantait 

 

j’écrivais la poésie 

 

 

*

 

je me souviens 

 

que j’aime d’amour 

 

les rochers 

 

qui émergent de l’eau 

 

sur la longueur du fleuve 

 

un jour, j’aimerais te montrer la Gaspésie 

 

par nos regards communs 

 

emprunter les routes de tes images 

 

te montrer les miennes 

 

il faudrait tenter de tout voir 

 

mais tout ne se révélerait pas 

 

car le mystère 

 

provoque un déluge de renversements systémiques 

 

la beauté est incroyable 

 

au cœur des ombres noircies de brume temporaire 

 

 

*

 

 

j’écrivais déjà :

 

j’aurais voulu tout réécrire 

 

et je dépose une pierre après l’autre 

 

avec mon pinceau et l’acrylique 

 

une ligne 

 

une tâche 

 

l’imprécision 

 

des dangereuses beautés 

 

je trace les lisières 

 

pour les apprivoiser mieux 

 

je n’ai plus de chaînes 

 

tout ce qui est est coulisses 

 

et ramures 

 

je voudrais te le dire au coin du corps 

 

dans le murmure 

 

du désir flagrant 

 

mais dépossédé de lui-même 

 

l’abandon 

 

à la forêt 

 

des arbres parleurs 

 

viens, viens me voir 

 

que je caresse chaque point de ta peau 

 

que j’en pétrisse l’argile 

 

les muscles sacrés 

 

 

*

 

 

voilà 

 

qu’au lieu de nos mains 

 

des oiseaux s’épanchent sur nos nuques 

 

pour nous tenir libres 

 

entre les pays 

 

voilà 

 

qu’à force de chanter ta disparition 

 

j’accroche des plumes 

 

dans les franges sèches 

 

des enfants mal-aimés 

 

voilà 

 

tu risques tout 

 

au nom des murailles extravagantes 

 

qui dérogent de nos corps légers 

 

nos corps d’oiseaux 

 

nos épaves sur le gravier 

 

nos plages de mots tendres 

 

voilà nos corps d’oiseaux 

 

éperdus en langage nouveau 

 

sur des rythmes 

 

que j’espère moins stoïques 

 

comme la chevelure d’un enfant tendre 

 

d’un enfant qui rage 

 

je boucle les boucles 

 

autour de ton cou 

 

je soumets toutes les fleurs 

 

au poids sans mesure de mes âges sans toi 

 

voilà on s’apprivoise sous la musique 

 

voilà 

 

on regarde le vert des pelouses 

 

on a faim de revoir le clair sous l’ombre 

 

de nos ailes ouvertes 

voilà 

 

voilà 

 

une répétition vaine des amours 

 

sans corps 

 

voilà ma précipitation dans le ventre de la mouette 

 

ton esprit de hibou 

 

voilà voilà 

 

nos mensonges sont des liqueurs crues 

 

nos espoirs se mélangent aux mélèzes 

 

voilà 

 

nous perdons nos aiguilles 

 

nos devenons pierre 

 

nous sommes des résidus frileux 

 

nous allons contre les vertiges 

 

pour y plonger 

 

tête première 

 

tête et bec 

 

et plumes

 

et je mange tes restes 

 

et tu grattes ma peau sur les os 

 

et je prends ta moelle pour un canevas de théâtre 

 

voilà voilà 

 

la corde se relâche 

 

la musique s’introduit dans les têtes 

 

nos voix sont graves sous la fumée

 

nous ne sommes plus 

 

et pourtant 

 

sur la grève 

 

roulent 

 

nos carcasses 

 

précieuses 

 

offrandes 

 

au sacré ciel 

 

des aurores boréales 

 

voilà voilà 

 

on ne s’atteint plus 

 

on se manque 

 

on se mange de l’intérieur 

 

on se désir 

 

nous n’avons plus de mains

 

nous n’avons que les yeux au bout de nos ailes fanées 

 

voilà voilà 

 

on est arômes

 

on est vagues  

 

amoncellement froid de roche 

 

voilà 

 

comme il est animal de se dévorer le cœur 

 

par le corps 

 

 

*

 

 

une tache 

 

de sang 

 

et tout est si parfaitement bien emboîté 

 

la péninsule de ces graves délires 

 

nous oublions le risque 

 

le premier grand décalage 

 

par surdose 

 

d’attente 

 

 

*

 

 

un enfant est déposé sur ton ventre 

 

tu es vieille depuis si longtemps 

 

ces regards ravalés comptent finalement 

 

 

*

 

 

on a rentré nos ventres 

 

avant qu’il soit trop tard 

 

avant l’hiver 

 

et la prochaine éclipse 

 

nos ventres durs 

 

nos ventres doux 

 

ces inclinaisons douteuses 

 

les provocations sinueuses des amours naissants 

 

on a vidé les pots 

 

déposé la terre sèche entre nos orteils et sous nos langues 

 

les plantes 

 

et nos rêves attendaient 

 

que vienne danser 

 

l’air froid 

 

les mêlées 

 

de chairs 

 

d’arbrisseaux 

 

et de fleurs à fruits 

 

on avait dans la chambre 

 

nos cœurs de grands

 

pour les souhaits d’adultes 

 

et ces sensations d’enfants 

 

assaillies d’interdictions 

 

nos dos étaient 

 

de fer 

 

des armures 

 

pour contrer 

 

le feu jaillissant 

 

des volcans trop durs 

 

avec pour seule affection 

 

cette eau 

 

coulée 

 

sur les feuilles maussades 

 

de nos bouches 

 

nos orteils dans les pots 

 

nos mains dans la terre 

 

cette bouche 

 

la tienne 

 

surprise 

 

dans le soupire sérieux et calme 

 

d’un respire humide 

 

on est géants 

 

au sortir de la réclusion

 

pour mener la course 

 

au sommet des montagnes 

 

tu me demandes encore 

 

si les larmes qui glissent de moi

 

sont un symptôme 

 

de la montée des eaux 

 

et je ne réponds pas 

 

on a assez de silences pour habiter 

 

avec toutes nos maisons sur les épaules 

 

et nos délires en contre-bas 

 

te regarder me regarder 

 

et remettre en terre 

 

les fleurs 

 

et sous les racines 

 

nos plus beaux baisers 

 

 

*

 

 

j’attends que la fin du jour 

 

ramène 

 

des corps 

 

un silence de jadis 

 

 

*

 

 

elle se tient partout 

 

jamais atteinte 

 

d’aucune ombre, la jolie proie fragile 

 

elle est masure 

 

et sa circonférence 

 

est les territoires insulaires 

 

dans l’ombre qui descend sur son visage 

 

certaines traces 

 

plus vives que les autres 

 

brillent 

 

ce sont les écorchures 

 

les traces du verre cassé 

 

elle remise les lucioles 

 

les fleurs séchées 

 

et les regards 

 

dans des bocaux transparents 

 

tous lui jettent des airs réprobateurs 

 

ses cils 

 

jadis longs comme 

 

des rivages abandonnés 

 

s’entassent

 

sur la ligne 

 

de ses paupières en fuite 

 

elle se tait 

 

sa parole 

 

davantage des chansons 

 

que des complaintes 

 

n’a de macabre

 

que les refuges voulus silencieux 

 

le monde est au bavures

 

quand nous perdons le fil 

 

de nos battements de cœur 

 

c’est à croire 

 

que toutes les rivières ne coulent plus 

 

que les arbres ont cessé leur grande montée vers le ciel 

 

que tes mains oublient la texture des miennes 

 

c’est à croire 

 

que mon volcan brûle la forêt de mes rêves 

 

et tes peurs renversent les glaciers de Terre- Neuve

 

dis-moi 

 

dis-moi 

 

saurons-nous aimer 

 

l’atmosphère 

 

de séduction grave 

 

comme la glaise trouvée 

 

sous le sable 

 

par-hasard 

 

saurons-nous voir 

 

sous le vacillement du soleil 

 

les peaux de nos sœurs de nos frères 

 

comme nous, 

 

des enfants de jadis 

 

enfoncés dans les commerces des âges précis 

 

des bocaux 

 

elle sort les bijoux 

 

les étend autour d’elle 

 

cercle protection spasme 

 

incantation 

 

elle s’amuse 

 

à te reconstruire 

 

te donne vie 

 

à chaque levée du rideau 

 

regarde regarde regarde 

 

le monde est un spectacle 

 

il faudrait peut-être répéter 

 

que confondre 

 

l’éternité et nos bouches 

 

ne nous mènera jamais à cette ligne fragile 

 

tenue 

 

entre l’eau de mer et le sel de tes pieds 

 

 

*

 

il y 60 ans Rosa Parks 

 

refusait 

 

de céder 

 

sa place 

 

dans l’autobus 

 

 

*

 

Emma me demande : 

 

et toi, tu as un bébé dans ton ventre? 

 

je dis : non, pas encore. Peut-être bientôt. 

 

*

 

savoir que 

 

tu es poète 

 

avant d’apprendre 

 

à aligner les mots

27 octobre 2019

Ses mots en zine sont disponibles ici.

L'écriture en mouvement, l'ouverture...

nelson mederik

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L’écriture en mouvement

 

Mon souhait, avec la poésie, c’est de permettre au regard de s’aiguiser, de s’habituer à voir le beau, et au cœur de ressentir fort cette beauté. 

  

2015-2016 Premier hiver à Percé

Je suis en plein processus d’écriture de mon projet de roman,débuté à la fin de l’été 2014 (et toujours en cours d’ailleurs). 

Je vis pour la première fois, en égale avec la nature. Je me retrouve tranquillement à ma place. Femme – Territoire – Rocher -Île – Pierres -Sable – Vent – Mer – Oiseaux – Champ -Humains – Poissons – Champignons -Baleines – Homard -Coquillages – Algues…

 

Je vis le changement des saisons. Du printemps à l’été, de l’été à l’automne, de l’automne à l’hiver. 

Je m’installe face à la baie vitrée de l’espace bureau de la maisonnette que je loue pour voir tourner au blanc les grands espaces sculpturaux des lieux. 

J’observe ces danses qu’esquisse le vent dans les nuages et dans les dérives de couleurs flamboyantes. Je suis aux premières loges pour sentir la lumière glisser sur ma peau moirée. 

J’ai l’âge d’or des solitudes lourdes, je ne sais pas me rendre aux autres. 

Brume en mon cerveau, je cherche à rendre les maux à la fiction. 

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Certains dimanches, je traverse l’allée glissante pour me rendre chez ma voisine, une octogénaire merveilleuse et accueillante, où je suis reçue comme membre de la famille. Ces soirées-là sont riches en discussions, les gens présents ont l’expériences de plusieurs vies et une foule d’histoires prennent naissances au fil des échanges. 

Un homme, lui aussi octogénaire, un érudit ayant traversé monts et merveilles au fil des jours de sa vie, m’entretient, passionnément, transférant ses souvenirs de sa tête à la mienne avec l’aisance et la confiance qui le portent vers ses derniers mois (il est malade et effrontément courageux et vif). 

Je sais que je danse parfois après le souper. Mais ce soir-là, celui dont je tente d’extraire la genèse d’une réflexion qui poursuit depuis son ascension en moi, je ne crois pas que ce soit mes mouvements de danse qui ont offert une certaine direction à notre discussion. Je me souviens. J’ai dû préciser que le personnage de mon roman est danseuse contemporaine… voilà. Plus tôt dans la journée, ou dans la semaine, j’en avais fait le choix.

 

Le mouvement.

 

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Je parle peu de l’histoire de mon roman. Ça m’arrive parfois, quand je me sens en confiance et lorsque l’autre montre qu’il est réellement intrigué par ce que je propose. 

Alors, peut-être que je venais de choisir de la passion de mon personnage principal et donc d’un certain angle de vue de son histoire. 

Je crois que jusqu’à ce moment-là, lors de cette conversation avec G., je sentais et percevais la vie avec une certaine linéarité qui me donnait mal au cœur. Comment l’expliquer? À des reprises à fortes fréquences, une grande émotion m’envahissait. Et je parvenais avec peine à me l’expliquer. Une forme de désir – comme une grande vague qui traverse le corps, prenant l’âme en otage pour lui montrer les étoiles du ciel de très près. J’accueillais avec difficulté l’émotion, parce que dès que j’en ai pris conscience, elle s’est mise à me faire peur et je ne savais plus comment, ni où me placer pour la vivre. Pour te situer, je dirais qu’il s’agit du pendant « positif » de la mélancolie. Encore là, qu’en sais-je? Puisque je tente d’expliquer quelque chose à surfaces multiples et insaisissables. Mais c’est exactement là mon point. 

Jusqu’à ce soir-là, je tentais de m’accrocher à la linéarité du temps et de ma vie, ressentant très bien qu’elle avait mille autres visages simultanés, mais sans connaître le chemin pour la vivre.

Et c’est à travers cette conversation avec G., toute simple, presque banale, que s’est révélée une forme d’essence de la vie, un parfum, un angle, une manière d’être et de percevoir le temps. 

Nous avons parlé de la danse. 

Il m’a fait voyager dans ses premières années au Canada, au Québec. Il arrivait de Paris, il arrivait d’ailleurs et encore d’ailleurs. C’était un enfant de la guerre. Enfant unique, il avait vécu sa petite enfance à Paris.

Il me racontait les belles années du disco. Pour lui, c’était en grande partie ça, la vie ; la belle époque! 

Puis il m’a parlé de sa maman. 

Il m’a dit que sa maman avait déjà étudié à l’école de danse d’Isadora Duncan. 

 

Je ne connais pas encore ce nom.  Qui est Isadora Duncan